Mon voisin refuse d’élaguer ses arbres, que faire ?

La distance des plantations est sans doute l’une des principales sources de conflit entre voisins
La distance des plantations par rapport à la limite de propriété, les branches qui dépassent sur votre propriété, les nuisances occasionnées par les végétaux… Autant de sujets susceptibles de générer des tensions entre voisins, notamment sur l’élagage des arbres.

Elagage des arbres : réglementation

La loi de donne pas l’autorisation de couper ou d’élaguer les arbres de son voisin si celui-ci ne les entretient pas. Vous pouvez couper les racines, les ronces ou les brindilles qui arrivent sur votre propriété. Mais vous ne pouvez pas vous charger de l’ élagage des arbres du voisin vous-même, même couper les branches qui dépassent sur votre terrain.

L’article 673 du code civil est clair : si votre voisin ne remplit pas ses obligations concernant l’élagage, on peut donc obliger son voisin à élaguer ses arbres.

Si des branches dépassent sur la voie publique, le trottoir ou la rue, la mairie peut agir contre le propriétaire du terrain sur lequel est planté l’arbre. Il peut envoyer une lettre de mise en demeure, et sans réponse, procéder à l’exécution forcée de l’élagage de l’arbre.

À l’inverse, la commune n’est pas tenue par les mêmes contraintes et peut planter des arbres en bordure de terrains privés. Cependant, la commune est tenue d’entretenir ses arbres, sinon vous pouvez faire élaguer les arbres de la commune, ou forcer cette exécution.

Distance légale des plantations

Le code civil prévoit une distance réglementaire pour les plantations. C’est l’article 671 du code civil qui définit cette distance. 

La règle de principe est simple : 

Si un arbre ou un arbuste dépasse 2 mètres de hauteur, il doit se trouver à au moins 2 mètres de la limite.
Pour les arbres situés entre 50 centimètres et 2 mètres de la clôture, la prescription part de l’époque où leur hauteur a dépassé 2 mètres.


La loi prévoit donc une zone de 50 centimètres en bordure de la limite de propriété, dans laquelle ne peut normalement se trouver aucune plantation. Se trouve ensuite une zone de 1,5 mètre dans laquelle ne peuvent se trouver que des arbres de moins de 2 mètres de haut.

Il s’agit d’une règle de principe, qui peut donc connaître des exceptions : La réglementation d’urbanisme locale peut en effet prévoir des règles plus strictes. Il faut alors consulter le plan ou le règlement d’urbanisme de votre commune ou le règlement de votre lotissement.

La jurisprudence du 13 juin 2012 rappelle ainsi que l’article 673 du Code civil n’est pas d’ordre public et que l’on peut y déroger. Ainsi, un règlement de lotissement peut contraindre de protéger et de maintenir la végétation sur le terrain quelles que soient leurs distances des limites séparatives.

La distance se calcule entre la limite de propriété et le milieu du tronc de l’arbre (et non de la branche la plus proche ou la plus éloignée). C’est donc bien la distance au sol qui nous intéresse et selon l’essence végétale, l’emprise pourra être bien plus importante en largeur qu’en hauteur.

Est-ce possible de faire couper de vieux arbres ?

La prescription acquisitive est un mécanisme par lequel une partie perd le droit d’agir contre un fait ou un dommage qui existerait depuis une période prolongée.

La prescription acquisitive est de 30 ans. 

Concrètement, cela signifie qu’un arbre ou un arbuste qui ne respecterait pas ces prescriptions du Code civil depuis plus de 30 ans ne pourrait plus faire l’objet d’une action judiciaire.

Le point de départ de la prescription est variable selon l’implantation de l’arbre.

Pour les arbres situés à moins de 50 centimètres de la clôture, la prescription part de leur plantation.
Pour les arbres situés entre 50 centimètres et 2 mètres de la clôture, la prescription part de l’époque où leur hauteur a dépassé 2 mètres.


Concrètement, la prescription acquisitive si elle peut être prouvée par le propriétaire de l’arbre va empêcher le voisin de demander l’abattage de l’arbre.

Un autre moyen de protéger un vieil arbre qui apporte du cachet à une propriété est de le faire classer.

Elaguer les branches qui surplombent la propriété voisine

Que les distances de plantation soient respectées ou que l’arbre bénéficie de la prescription acquisitive, ses branches ne peuvent avancer jusqu’au-dessus de la propriété du voisin. 
Tout propriétaire peut contraindre son voisin à élaguer les branches qui surplombent sa propriété. Ce droit n’est quant à lui pas soumis à la prescription acquisitive, mais peut être restreint par un règlement de lotissement par exemple.

Les juges de la Cour de cassation ont même décidé que ce droit peut s’exercer quelles qu’en soient les conséquences, même si l’arbre doit en mourir (3e chambre civile du 31 mai 2012, pourvoi n° 11-17313).

Attention cependant, il est formellement interdit de procéder soi-même à l’élagage d’une branche. Si vous coupez une branche sans l’accord du propriétaire de l’arbre, vous répondrez alors des conséquences qui en découleront.

Il en va autrement des racines qui avancent, et vous pouvez parfaitement les couper à la limite de votre propriété.

Quel sort pour les fruits qui poussent sur ces branches ?
Les fruits qui sont sur une branche en surplomb de votre propriété appartiennent, par principe, au propriétaire de l’arbre. 

Il vous est donc interdit de les cueillir sur la branche des arbres fruitiers.

Par contre, dès qu’ils tombent au sol, ils deviennent alors votre propriété et vous pouvez en disposer librement.
Il faut bien évidemment préciser que, au même titre que l’interdiction de cueillir ces fruits, vous ne pouvez pas provoquer leur chute (en secouant la branche par exemple).

Autres raisons de demander l’élagage ou l’abattement d’un arbre : le droit commun de la responsabilité

Au-delà de toutes ces règles très spécifiques, le droit commun de la responsabilité trouve aussi à s’appliquer en ce qui concerne les plantations.

Les arbres et plantations peuvent provoquer des nuisances pour le voisinage : 

Vue gâchée par la hauteur d’une haie
Toitures, gouttières et terrasses souillées par les déchets d’un arbre
Ombre permanente sur un immeuble du fait de la végétation
Présence de nuisibles attirés par une essence ou par l’entretien d’un espace vert.


Les nuisances sont multiples, et peuvent être réelles quand bien même la haie, l’arbre ou le bosquet seraient à bonne distance et sans surplomb. Il n’existe pas de texte spécifique pour chacun de ces cas et la responsabilité du propriétaire sera mise en œuvre par l’article 1242 du code civil.

Dans ce cas, vous devrez formuler votre préjudice et exprimer votre demande auprès de votre voisin. 
Votre voisin, le propriétaire des plantations concernées, pourra alors y donner suite. S’il ne donne pas suite, vous pourrez alors initier une démarche amiable plus officielle, ou obliger votre voisin à élaguer ses arbres via une action en justice.

Recours amiable ou judiciaire

Depuis le 1er janvier 2020, il est devenu obligatoire de tenter une résolution amiable de tous les litiges du voisinage avant une action en justice. Par tentative de résolution amiable, seules une conciliation, une médiation ou une procédure participative sont retenues par les tribunaux.

Recours amiable

Certains sites proposent un processus en ligne pour respecter cette nouvelle obligation, et plus que cela, vous aidez à résoudre rapidement votre différend avec votre voisin. À partir des éléments renseignés, un courrier recommandé avec accusé de réception est envoyé à votre voisin, courrier conçu pour être plus efficace qu’une mise en demeure. Ce courrier fait part de votre demande et l’incite à l’accepter ou à négocier un accord amiable.

Les experts, médiateurs certifiés, vous accompagneront jusqu’à la signature d’un accord, qui aura la même valeur juridique qu’une décision de justice après homologation.

Recours judiciaire

Concernant les distances des plantations, la règle est écrite. Les pouvoirs d’appréciation du juge seront donc très limités. Il se contentera d’apprécier de la distance des arbres par rapport à la limite du terrain et par rapport à leur hauteur.
Il est évidemment nécessaire de pouvoir déterminer la limite. Si ce n’est pas possible, vous devrez au préalable faire réaliser un bornage du terrain.

Si votre voisin souhaite faire valoir la prescription, il devra prouver l’ancienneté de l’arbre (ou de sa hauteur) pour éviter son abattage total.

Si votre action se place sur le terrain de la responsabilité, c’est sur l’appréciation du juge que reposera votre action. Vous devrez prouver l’existence du préjudice et sa causalité avec les arbres concernés. Et quand bien même, c’est au juge qu’il appartiendra de décider de la réparation en nature (abattage ou élagage) ou en dommages-intérêts.

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